par The X Phil » 18 Oct 2006, 22:15
Ma critique du disque :
Si "Sam's Town" ne répond pas totalement à l’attente énorme qu’il avait suscitée, il reste tout de même très grand. C’est même un « second album » idéal, s’intégrant totalement dans la lignée du premier, tout en approfondissant le style et l’univers du groupe.
Avec « Hot Fuss », The Killers imposait une musique très inspirée de la new wave anglaise, en y intégrant du gros son rock à l’américaine (ils sont de Las Vegas). Pour leur second opus, le leader Brandon Flowers avait annoncé un disque « plus américain ». De fait, les guitares sont bien plus lourdes et âpres ici ; de même que les textes sont plus proches de l’american way of life. Malgré tout, on reste en terrain connu, et « Sam’s Town » aligne les morceaux de pop lumineuse comme des perles. La force du groupe réside dans ces mélodies à la fois si évidentes et totalement accrocheuses. Une fois entendues ces rythmiques précises, ces boucles de guitares aériennes, ces synthés furieux, impossibles de se les enlever du crâne.
Là-dessus, la voix sauvage et déchaînée de Flowers est un complément idéal, aussi arrogante que la musique. Bien qu’il soit plus proche d’un Simon le Bon (c’est lui qui le dit !) de Duran Duran que d’un Dave Gahan de DM, Flowers sait tirer parti de son chant, le poussant parfois dans ses limites et se révélant alors très intéressant, loin des braillards habituels.
Et il y a fort à parier que l’album serait moins bon sans la production assurée par Flood et Alan Moulder, petits génies des manettes à l’œuvre auparavant chez Depeche Mode, Smashing Pumpkins ou U2 (ce n’est sûrement pas un hasard si le groupe s’est tourné vers eux). Ils savent tirer le meilleur parti des morceaux et leur mixage est une merveille.
La première moitié du disque est absolument monstrueuse et entraîne l’auditeur dans une spirale pop rock propre à le laisser sur le carreau. Dès l’ouverture, avec la chanson « Sam’s Town » qui donne son titre à l’album, on est accueilli par une cavalcade de batterie et de synthés. Très vite, les guitares et le chant s’y mettent aussi pour une chanson qui pourrait résumer à elle seule le style du disque : flamboyant et puissant. On enchaîne avec un court morceau au piano intitulé « Enterlude », dans lequel Flowers nous invite à entrer dans l’univers du groupe (« We hope you enjoy your stay, it’s good to have you with us, even if it’s just for today »), avant de lancer dans la foulée le premier single ravageur « When we were young » et ses guitares en folie. « Bling (Confessions of a king) » ressemble à du U2 sous acide et s’avère un million de fois plus jouissif que ce modèle. Puis, ce sont « For Reasons Unknown » et « Read My Mind », deux variations (une rapide et une plus lente) sur le même thème, qui développent leurs arpèges endiablés et leurs mélodies carrées pour une efficacité maximum. Avant la bien rock « Uncle Johnny » et sa rythmique implacable.
Là, on se dit qu’on tient un chef d’œuvre absolu. Mais malheureusement « Bones », morceau assez simpliste et se réfugiant dans la facilité que le disque savait éviter jusqu’ici, tempère très vite nos ardeurs. L’album a du mal à s’en relever, et semble alors bégayer jusqu’à la fin, reproduisant en moins bien les schémas de la première partie. Ce n’est pas désagréable pour autant, c’est même très bon, mais le groupe semble alors avoir perdu la fraîcheur des premiers morceaux. Pourtant, « My List », le morceau le plus lent du disque (au moins jusqu’au refrain) est suffisamment étrange pour éveiller la curiosité. Mais « The River is wild » est trop grandiloquent, même si ça reste meilleur que le premier Muse venu. Et « Why do I keep counting ? » est une tentative un peu bancale de « chanson de fin de disque en apothéose » qui ne convainc pas vraiment. Tout le contraire de « Exitlude », petit morceau de conclusion qui répond à « Enterlude » au début (en reprenant la même mélodie et les paroles), superbe petite pièce pop pas tellement éloignée des Beatles période « Sergent Pepper » et qui termine le disque sur une note rêveuse du plus bel effet. Enfin, il y a encore en super bonus le remix du « When we were young » par Jacques Lu Cont - déjà responsable du remix foireux de « Mister Brightside » sur le premier album - c’est aussi pourrave, et il vaut mieux arrêter le disque avant d’en arriver là.
Difficile de dire si « Sam’s Town » est plus réussi que ou non que « Hot Fuss » ; ce dernier avait l’avantage de sortir de nulle part et d’être une grosse baffe, le second est plus assuré malgré la baisse de régime sur la fin.
En tout cas, The Killers nous offrent un disque magnifique qui éclaire cette fin d'année musicale maussade et risque bien de tourner sur mes platines aussi souvent que leur premier album. Espérons juste que le groupe ne va pas devenir trop énorme (tant mieux pour eux !) et y perdre son âme (tant pis pour nous !).