RAMMSTEIN
Festival des VIEILLES CHARRUES - Jeudi 18 juillet - Carhaix (site de Kerampuilh)Ce n’est qu’à la mi-juin que je me suis finalement décidé pour cette date Rammstein-ienne en Bretagne, après avoir quelque peu hésité pour plusieurs raisons : date en semaine avec boulot tôt le lendemain matin, gros festival avec rassemblement d’une foule hétéroclite, difficulté de trouver des comparses pour m’y accompagner car peu motivés ou pas vraiment attirés par l’affiche et puis ... la flemme du quarantenaire tout simplement qui parfois me guète le soir ... Bref, étant un (presque) local de l’étape, j’achète ma place à peine un mois avant la date, prenant ainsi « l’engagement » de dépasser la démotivation de dernière minute. Une petite heure de route sépare mon lieu d’habitation de la commune de Carhaix et, connaissant les lieux, je sais qu’il me faudra ensuite marcher une demi-heure pour faire la jonction entre les parkings et le site du festival …
Du festival des Vieilles Charrues je n’ai que peu de souvenirs, n’y ayant assisté qu’à deux reprises (en 1998, y étant plutôt par hasard que par envie, et en 2012 pour assister au concert de The Cure, année où la question de trouver la motivation ne s’est guère posée !). Les Vieilles Charrues c’est tout de même l’artillerie lourde avec sa cohorte de bénévoles, une organisation réglée comme du papier à musique, un site énoooooorme où la foule pourtant impressionnante n’est jamais oppressante, du moins c’est un ressenti partagé avec de très nombreux amis et connaissances. Et puis, faut bien l'avouer, c'est aussi une sacrée affiche pour un petit coin de France si paisible, territoire breton marqué par une très forte identité culturelle. Le festival est aussi fidèle à sa réputation avec la bière qui coule à flot, l’ambiance très festive (revendiquée et assumée), le public bigarré et vraiment composé de tout types de populations : des jeunes, des moins jeunes, des fans, des non-fans, des touristes, des papa-mamans, des papis-mamies, des pères de familles qui accompagnent leurs progénitures au festoch’
« parce que bon les Vieilles Charrues c’est tout de même un gros truc, hein, et puis y’a de tout là-dedans ! ». Pour autant ce n’est pas un festival que l’on peut qualifier de joyeux bordel comme pourrait le laisser suggérer quelques reportages, l’organisation y étant au cordeau, l’accueil du public étant privilégié, la sécu au top à tous les niveaux. De plus la démarche d’un tel festival solidaire et associatif reste, de mon point de vue, une démarche à défendre et à encourager (en comparaison aux grosses machines créées dans le seul but de générer de l’argent pour -entres autres - les actionnaires de Livenation).
Travaillant toute la journée, avec de plus un programme professionnel chargé, il m’est impossible de disposer de mon après-midi pour me rendre sur le site du festival. Raphaël est programmé en ouverture ce jour là … rien de dramatique donc si j’arrive dans la soirée … Rammstein est programmé à 22h25, je prends donc un peu mon temps même si j’apprécierais de revoir The Hives (programmés vers 20h00) dont l’énergie et les mélodies rendent à chaque fois les prestations du groupes comme étant de très très grands moments de pure énergie. J’arrive donc à Carhaix vers 20h30 et après avoir garé mon véhicule je me dirige à pied vers le site de Kerampuilh. Il fait encore chaud après une journée écrasée par un soleil torride et les T-shirts Rammstein sont bien visibles. Une fanbase a fait le déplacement, même si cette date française a visiblement été boudée par de nombreux aficionados du fait « d’un lieu trop éloigné de tout pour un concert de Rammstein », dixit certains fans. D'ailleurs ce soir ce n'est pas complet, entre 25000 et 30000 festivaliers y sont attendus ce jeudi sur près de 40000 tickets à la vente.
J’entre sur le site après avoir attendu seulement 10 minutes aux portes du festival où se masse une petite foule. Le mouvement est continu, avec une fluidité impressionnante et plusieurs travées dans laquelle attendent deux points de contrôles des tickets puis la fouille. J’entre sur le site. C’est toujours aussi impressionnant de découvrir l’étendu du festival, avec ses différentes scènes dispersées de part et d’autre, les centaines de mètres de buvettes, stands restauration, merchandising, espaces partenaires publicitaires mais aussi les différents espaces organisateurs et bénévoles.
Sur la scène Kerouac ça joue fort. The Hives met le paquet, comportement tout naturel pour ce groupe dont la réputation scénique n‘est plus à faire. La densité humaine présente face à la scène se laisse faire et les deux grands écrans latéraux ainsi que les colonnes de son positionnés en « relais », à une trentaine de mètres de la scène, retranscrivent parfaitement le travail des ingénieurs du son. Les Vieilles Charrues c’est aussi ça : un son toujours impressionnant pour un festival Open-air de cette dimension. J’assiste à la dernière heure du concert, l’ambiance est là, le chanteur du groupe a toujours autant la frite, il joue avec le public et tout naturellement ça répond. C’est Rock’n’Roll, tout en finesse, ça fait grimper les fourmis dans les jambes, c’est positif, ça donne le sourire et ça met la bonne grosse patate.
La nuit n’est pourtant pas encore tombée et l’heure à laquelle Rammstein doit investir les lieux approche. The Hives termine son show et je prends le parti de rejoindre la scène Glenmor pour me trouver un bon point de vue. Les fans hard-core sont déjà agrippés aux grilles face à la scène et la butte enherbée qui y mène est parsemée de festivaliers, assis tranquillement pour les uns, une eco-cup à la main, ou debout pour les autres, les yeux attirés par les écrans géants qui diffusent la fin du concert de The Hives. Même à cet endroit le son est clair, diffusé par les enceintes placées derrière l‘échafaudage gigantesque accueillant la régie pyro et lumière de Rammstein. Au fur et à mesure que je descends, je prends conscience que la scène est elle-aussi immense, à la démesure du groupe allemand. Je me place sur le côté gauche, tout proche de la scène, à quelques mètres de la barrière d’enceintes qui se révèle être à l’échelle du plateau … c’est clair, on va en prendre plein les mirettes, mais aussi plein les oreilles. L’attente se fait sentir. A peine The Hives termine son show, le public scande déjà le nom de Rammstein à pleins poumons. Pour le moment la scène est masquée par une tenture et le personnel technique s’agite dans la fosse réservée à la sécurité et aux photographes. De brefs riffs de guitare retentissent en guise de dernier checks et les écrans diffusent des reportages de la web-TV ainsi que des images live du public. Il plane dans l’air cette ambiance électrique de l’attente d’avant concert, les yeux sont tous rivés sur la scène, les fesses ne sont plus posées sur l'herbe … jusqu’au moment où des explosions retentissent sur et derrière la scène, provoquant les premiers éclairs et détonations de la soirée. Le show démarre par Ich Tu Dir Weh et la tenture géante s’affaisse sur la scène, laissant apparaître le groupe. C’est déjà du grand spectacle, le ton est donné, avec scène à étage, installation lumière impressionnante, nacelle descendant doucement du haut de scène, livrant doucement mais surement le colosse blond platine, moumoute rose bonbon, Till Lindemann à son public. Le son est puissant, les basses sont très présentes, ça claque et au bout de 30 secondes de show je prends le parti de m’éloigner des enceintes, ressentant les fortes vibrations basses dans ma cage thoracique … à s’en faire décoller la plèvre … Je m’éloigne de quelques mètres, toujours sur le côté et le point de vue est vraiment pas mal, à 10 mètres de la scène environ. A cet endroit il y a de la place, et je peux profiter du spectacle sans sentir de bousculade, mis à part les quelques énervés qui se décident de rejoindre la masse parquée face à la scène, sans tenir compte des éventuels obstacles humanoïdes sur leur passage (qui a dit « Bourrins ! » ?).
Le groupe est en forme et tient le public dans le creux de la main, un public conquis d’avance. Les titres s’enchaînent, la setlist est sans surprise, c’est celle de la tournée et le déroulé de la mise en scène suit ce même schéma. Lindemann est toujours aussi charismatique, son poing qui bat la mesure sur sa cuisse quand les riffs s‘emballent, son regard de psychopathe second degré et sa voix si puissante, agressive et pourtant toute en rondeurs. Les deux guitaristes sont aussi bien présents et partagent le moment avec le public. Tous les ingrédients ayant fait la réputation scénique de Rammstein sont présents : le feu, les lance-flammes, la pyrotechnie, le décor, et surtout ces riffs dantesques nappés d’électro, couplés à des refrains grandiloquents, pourtant si mélancoliques. On peut juste regretter le côté routinier induit par le choix du groupe de reproduire à chaque concert le même spectacle où tout semble réglé au cordeau, sans improvisation. Il y a pourtant beaucoup d’humour et d’humanité dans cet univers qualifié de métallique ou industriel.
De mon point de vue, le concert a vraiment décollé à partir de Feuer Frei! . Forcément, Bang Bang! est repris en chœur par la foule et les lance flammes « de bouche » provoquent toujours autant leur petit effet. Il en est de même avec la mise en scène sur Mein Teil, toujours aussi drôle et grand guignolesque. Le spectacle est vraiment total et le public a les yeux grands ouverts. Un public composé de fans mais aussi de « touristes » venus par curiosité. Bon, faut admettre que certains tableaux relèvent carrément du mauvais goût. Mais on relativise en se rappelant que Rammstein sur scène c’est du 15ème degré … Les flots de semence masculine plus que suggérés, la simulation de sodomie SM sur la nacelle, le sang et le couteau de boucher et le vomi de Till sur l’avant-scène (simulé lui aussi ? Ou excès de schnaps ?), personnellement ça m’a plutôt fait sourire de bon cœur. Les fans jubilent. Reste la qualité musicale. Le metal indus de Rammstein on aime ou pas. En tous les cas faut reconnaitre que ça joue et que ça chante juste, que c’est plein de générosité, que ça envoie et que le plaisir est total.
Le set s’achète sur Ich Will après une floppée de tubes et le groupe quitte la scène avant de revenir rapidement. Le rappel débute par Mein Herz Brent version piano/voix (fabuleux, redressement de poils assuré !) avant d’embrayer sur Sonne pour l’un des plus beaux refrains du rock contemporain, repris en chœur par la foule. Le show se termine ensuite comme une énorme fête sur un titre discutable pour une fin de concert (Pussy - j’aurais tant aimé entendre Stripped !). Et pourtant ce choix s’avère totalement justifié par l’effet final collant au thème du morceau (!?) : le fameux canon-pénis à mousse, sur lequel Till Lindemann arpente la fosse afin d’inonder le public des premiers rangs, est de sortie. Les derniers artifices explosent en avant-scène, projetant des milliers de confettis blancs qui finissent par englober le public et le groupe dans un nuage très aérien et au final très poétique (si si !). Sur les dernières nappes de clavier le groupe salue son public par le traditionnel « Rammstein aime beaucoup la France, merci beaucoup, danke schön » de la voix grave de Till Lindemann.
C’est fini, les techniciens et roadies sont déjà sur scène pour le démontage. Je reprends moi aussi rapidement conscience du monde réel qui est le mien et il me faut redescendre de ce petit nuage ... ce qui se traduit concrètement par résister à l’envie de m’arrêter devant l’autre scène puisque les sons de Vitalic VTLZR retentissent déjà dans les enceintes. il est 00h15 et trois épreuves m’attendent : fendre la foule pour traverser le site gigantesque avant de rejoindre ma voiture située à ½ heure de marche, me taper une heure de route et surtout me lever dans 5 heures pour terminer la semaine de travail, l’esprit encore un peu dans la fosse de Kerhampuilh …
J’espère revivre les même émotions l’an prochain, au même endroit, avec le groupe qui nous intéresse principalement sur ce forum … on nous a bien laisser entendre une tournée des festivals pour 2014, non ? ... Sainte acouphènes si tu m’entends …
Setlist :
Ich tu dir weh
Wollt ihr das Bett in Flammen sehen?
Keine Lust
Sehnsucht
Asche zu Asche
Feuer frei!
Mein Teil
Ohne dich
Wiener Blut
Du riechst so gut
Benzin
Links 2-3-4
Du hast
Bück dich
Ich will
Mein Herz brennt (piano version)
Sonne
Pussy
Photos issues de l'édition de Ouest France du vendredi 19 juillet :