[spoiler] Caché

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Messagepar jb » 09 Nov 2005, 10:11

Haneke filme la culpabilité et le poids qu'elle peut avoir sur la conscience, le mensonge, la confiance dans un film lent mais aussi, comme souvent chez Haneke, troublant et violent. Attention, les nombreux plans très lents voire fixes peuvent sembler peu interminables et derouter le spectateur. On est de toutes façons en face d'un film qui ne laisse pas indifférent.

Daniel Auteuil est toujours impeccable. Juliette Binoche qui joue sa femme est plus en retrait. Un film dont on sort un peu déboussolé. Ne cherchez pas la BO du film, il n'y en a pas !
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Messagepar Impératrice » 09 Nov 2005, 16:27

J'avoue avoir eu vraiment du mal à saisir les tenants et les aboutissants de ce film.
Pour sûr qu'il ne laisse pas indifférent : quand nous (les spectateurs d'une scénace) sommes sorti et avons croisés ce qui allaient rentrer, il paraît que nous faisions des têtes d'enterrement, et il y a de quoi. Un film qui remue, c'est certain.
Aussi troublant que soit le film, la fin m'a laissée perplexe, et je me demande encore : "pourquoi" et "pour dire quoi" ? Un travail sur la culpabilité, certes. Et sur la veangeance aussi ? Je n'ai toujours pas réussi à trouver une réponse à cette question.
Auteuil ne m'a que moyennement convaincue, personnellement.
Intéressant.
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Messagepar The X Phil » 09 Nov 2005, 18:21

Comme tous les films d'Haneke, "Caché" pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses...
Après, c'est soit très bien fait, comme ici, soit complètement vide et on a l'impression qu'il passe plus de temps à nager dans de hautes sphères intellectuelles qu'à essayer de livrer un film.

Là, c'est clair qu'on ne comprend pas tout, mais l'essentiel est que d'une certaine façon, on ressent ce qu'il veut nous dire. et sans être capable forcément de le formuler, on voit bien où il veut en venir (la culpabilité, oui, mais aussi une critique de la société bourgeoise prête à fermer les yeux sur tout pour conserver son petit confort...).

C'est par contre moins fort que "Funny Games", le film ultime de Haneke pour moi parce qu'il arrive à être aussi dérangeant et aussi fort que tous les autres, tout en étant limpide.
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Messagepar Impératrice » 09 Nov 2005, 19:15

The X Phil a écrit:Après, c'est soit très bien fait, comme ici, soit complètement vide et on a l'impression qu'il passe plus de temps à nager dans de hautes sphères intellectuelles qu'à essayer de livrer un film.

Franchement, je ne sais trop quoi penser. Je me suis sentie très stupide en sortant de la projection, et ce n'est jamais très agréable. Je ne pense pas que ce soit le but du réalisateur, mais le résultat est là, avec un cortège d'incohérences.

Pour ce qui est des questions posées sans réponses, je trouve dommage que certaines pistes soient ébauchées et restent totalement sans explications, d'où cette impression d'être stupide. Que faire des plans sur cet enfant qui crache du sang, de la position imporbable de la caméra qui aurait filmé, de la manière dont les cassettes arrivent à leur destinataire ? On frôle souvent le fantastique tout en restant dans un réalisme extrême. Cela me laisse subitative. Toujours et désespérément.

Une critique du couple bourgeois qui ne communique pas, reste dans son confort et ses certitudes ? Peut-être, mais il traverse cette crise comme un orage. On a très peur, on se cache sous son lit, on crie et on hurle de terreur, et on en ressort pareil une fois l'orage terminé. Un déchirement, mais pas de rupture (je tire mon chapeau à Binoche tout de même).

Cela reste un film que je ne comprends pas. J'ai peut-être besoin de voir des films plus "narratif", voilà tout :)
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Messagepar jb » 09 Nov 2005, 21:29

Impératrice a écrit:Franchement, je ne sais trop quoi penser. Je me suis sentie très stupide en sortant de la projection, et ce n'est jamais très agréable. Je ne pense pas que ce soit le but du réalisateur, mais le résultat est là, avec un cortège d'incohérences.

Je me demande si ce n'est pas le but de Haneke de jouer un petit peu avec les spectateurs. Les plans fixes du début du film m'ont tout de suite inquiété ("purée ça va être comme ça pendant tout le film ?") et les ranbobinages de VHS donnent cette impression que le réalisateur s'amuse un peu avec nous.

Pour ce qui est des questions posées sans réponses, je trouve dommage que certaines pistes soient ébauchées et restent totalement sans explications, d'où cette impression d'être stupide. Que faire des plans sur cet enfant qui crache du sang, de la position imporbable de la caméra qui aurait filmé, de la manière dont les cassettes arrivent à leur destinataire ? On frôle souvent le fantastique tout en restant dans un réalisme extrême. Cela me laisse subitative. Toujours et désespérément.


Les plans sur l'enfant qui saigne n'ont pas de cohérence au début, mais plus le drame avance, plus on comprend de quoi il s'agit.

Une critique du couple bourgeois qui ne communique pas, reste dans son confort et ses certitudes ? Peut-être, mais il traverse cette crise comme un orage. On a très peur, on se cache sous son lit, on crie et on hurle de terreur, et on en ressort pareil une fois l'orage terminé. Un déchirement, mais pas de rupture (je tire mon chapeau à Binoche tout de même).


Je ne crois pas que le couple ressorte indemne une fois l'orage passé. Le gamin est complètement largué par le comportement de ses parents voire complice de ce qui s'est passé (voir la dernière scène ou on le voit discuter avec le fils de Majid sur les marches de son école si on regarde attentivement). Daniel Auteuil lui-même croit être débarassé de cette réminiscence de son enfance mais il n'y arrive pas : Le fils de Majid vient lui demander des comptes sur son lieu de travail ; pire la scène ou Majid enfant est enlevé de sa famille adoptive est terrible et sonne comme un cauchemar qui hante à jamais Auteuil.

Moi c'est le suicide qui m'a traumatisé. Je ne sais pas si c'est la façon de filmer ultra réaliste de Haneke (plan séquence fixe, caméra qui ne bouge pas) ou la soudaineté de l'action, mais j'ai trouvé cette scène d'une violence inouie.
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Messagepar jb » 09 Nov 2005, 21:37

The X Phil a écrit:Là, c'est clair qu'on ne comprend pas tout, mais l'essentiel est que d'une certaine façon, on ressent ce qu'il veut nous dire. et sans être capable forcément de le formuler, on voit bien où il veut en venir (la culpabilité, oui, mais aussi une critique de la société bourgeoise prête à fermer les yeux sur tout pour conserver son petit confort...).

C'est clair que la critique des bobos est là : j'ai été marqué par les ustensiles qui brillent dans la cuisine de monsieur et madame. Mais il ne s'arrête pas là, il y a également l'individualisme du personnage d'Auteuil qui est incapable de partager ses angoisses avec sa femme qui est omniprésent, ainsi que madame qui pleure sur l'épaule de son "ami" et plein d'autres détails.

Plus généralement, ne peut-on pas dire que le thème de la guerre d'Algérie est abordé dans cette histoire ?
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Messagepar kvod » 09 Nov 2005, 22:07

The X Phil a écrit:C'est par contre moins fort que "Funny Games", le film ultime de Haneke pour moi parce qu'il arrive à être aussi dérangeant et aussi fort que tous les autres, tout en étant limpide.

Je n'ai pas trouvé Funny games aussi limpide que ça. Il est complexe et incompréhensible, aussi incompréhensible que les agissements des 2 héros en blanc et aussi incompréhensible que les comportements de tout à chacun, tout simplement.

La question fil rouge des films d'Haneke est toujours "Pourquoi? Pourquoi en arrivent-ils à réagir comme cela?" et c'est toujours aussi fort.

Je suis vraiment très emballée par Caché, que j'ai trouvé sublime, à la hauteur de Daniel Auteuil.

Les procédés un peu déroutants du film comme les arrêts sur image, les rembobinages, les dialogues hors champs, la caméra fixe sont très courants dans les films précédents d'Haneke. Ils étaient déjà présents dans Funny games (où ces procédés réussissent littéralement à traumatiser le spectateur), dans Benny's video. Peut-être moins dans La pianiste parce que, je pense, Haneke avait cherché à se focaliser sur la puissance des acteurs et du roman dont le film était inspiré.

De plus, Pierrot, le fils de Daniel Auteuil dans le film, m'a beaucoup rappelé l'adolescent Benny dans Benny's video.
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Messagepar Anouche » 09 Nov 2005, 22:21

jb a écrit:Moi c'est le suicide qui m'a traumatisé. Je ne sais pas si c'est la façon de filmer ultra réaliste de Haneke (plan séquence fixe, caméra qui ne bouge pas) ou la soudaineté de l'action, mais j'ai trouvé cette scène d'une violence inouie.

Absolument, cette scène m'a littéralement arrachée un cri, elle est terriblement bien tournée !

Haneke est un chirurgien de l'image, il est vraiment très particulier.

Ce film m'a vraiment perturbé, la cruauté d'un enfant boulverse plusieurs vies d'abord, il semble que rien ne peut atteindre cet enfant devenu homme sans humanité, comme anesthésié de sa propre vie...

Mais une chose, avez vous "trouvé"/vu la réponse à la fin du film, dans le plan fixe ???
Car moi je n'ai pas vu (le personnage, juste les deux enfants) qui a tiré toutes les ficelles justement, pourtant je savais que la réponse se trouvait dans ce dernier plan...




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Messagepar Impératrice » 09 Nov 2005, 22:24

Les plans sur l'enfant qui saigne n'ont pas de cohérence au début, mais plus le drame avance, plus on comprend de quoi il s'agit.

Je suis tout à fait d'accord, mais pourquoi ces plans si en plus c'était un mensonge ? C'est le début de la culpabilité ? Le mal commence à ronger Auteuil ? Un rêve ? Certains plan sont des rêves, exprimés comme tels, pour l'enfant qui crache du sang, tout reste très ambigü.

Moi c'est le suicide qui m'a traumatisé.

Comme tout le monde, je crois. Cri d'horreur dans les salles obscures. Trop réaliste pour permettre un détachement...

la dernière scène ou on le voit discuter avec le fils de Majid sur les marches de son école si on regarde attentivement

Ca, j'ai raté. J'ai pourtant cherché (c'est peut-être la seule chose "attendue" dans ce film) mais je suis passée à côté. Tant pis.

Plus généralement, ne peut-on pas dire que le thème de la guerre d'Algérie est abordé dans cette histoire ?

C'est peut-être aller un peu loin, je trouve.
Disons que le contexte explique effectivement la disparition tragique des parents de Majid. Cela renforce le drame qui marque tout une vie. Peut-on ensuite transposer la culpabilité du personnage d'Auteuil à celui de la France qui traite mal les algériens en général et les harkis en particulier ? Pourquoi pas... D'autres interprétations ?
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Messagepar Anouche » 09 Nov 2005, 22:37

jb a écrit:Le gamin est complètement largué par le comportement de ses parents voire complice de ce qui s'est passé (voir la dernière scène ou on le voit discuter avec le fils de Majid sur les marches de son école si on regarde attentivement).

Alors ça serait ça la réponse ??? Je n'ai pas voulu y croire, mince...
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Messagepar kvod » 09 Nov 2005, 22:47

Impératrice a écrit:D'autres interprétations ?

Un thème que j'ai également trouvé sous-jacent au film c'est la cruauté de la jeunesse, la cruauté de l'enfance.

Daniel Auteuil enfant dénonce le petit Majid par pure jalousie, pour conserver l'amour exclusif de ses parents, jusqu'à détruire en quelque sorte la vie de Majid.

Pierrot, le fils de Majid, disparaît sans donner de nouvelles à ses parents qu'il sait morts d'inquiétude. Je pense qu'il est également lié à cette histoire de K7 reçues par ses parents. Cette hypothèse pourrait également être confirmée par ce fameux dernier plan où Pierrot parle devant son lycée au fils de Majid.

Le fils de Majid vient voir Daniel Auteuil pour le mettre face à sa culpabilité, pour lui signifier qu'il a la mort de Majid sur la conscience et la souffrance de sa famille.

J'ai également trouvé le personnage de Daniel Auteuil très immature dans le film. IL se débat, se défend, dénonce comme il a pu le faire à 6 ans. Il se referme sur ses problèmes, garde le silence face à sa femme morte d'angoisse comme peut le faire Pierrot, son fils adolescent.
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Messagepar jb » 10 Nov 2005, 11:33

Impératrice a écrit:Je suis tout à fait d'accord, mais pourquoi ces plans si en plus c'était un mensonge ? C'est le début de la culpabilité ? Le mal commence à ronger Auteuil ? Un rêve ? Certains plan sont des rêves, exprimés comme tels, pour l'enfant qui crache du sang, tout reste très ambigü.

Pourquoi veux-tu que ce soit un mensonge ? Il y a un corbeau qui envoie ces dessins. Auteuil comprend très vite que cela à quelque chose à voir avec son passé. Les plans de l'enfant qui saignent ne sont soit des réminiscences du passé, soit des cauchemars de Auteuil.
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Messagepar jb » 10 Nov 2005, 11:35

Anouche a écrit:Alors ça serait ça la réponse ??? Je n'ai pas voulu y croire, mince...

Je ne sais pas s'il faut porter beaucoup d'importance à cette fin. Le corbeau pourrait très bien être Haneke himself, à mon humble avis.
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Messagepar jb » 10 Nov 2005, 11:36

kvod a écrit:J'ai également trouvé le personnage de Daniel Auteuil très immature dans le film. IL se débat, se défend, dénonce comme il a pu le faire à 6 ans. Il se referme sur ses problèmes, garde le silence face à sa femme morte d'angoisse comme peut le faire Pierrot, son fils adolescent.

Haneke insiste sur cela plus que sur la cruauté du gamin dans Télérama :

"Michael Haneke : Il ne s'agit pas de la culpabilité en soi d'un petit garçon qui s'est mal comporté quand il avait 6 ans. Il s'agit plutôt de celle de l'homme qu'il est devenu au moment où il retrouve celui qu'il a offensé. De fait, il se comporte comme un salaud, alors même que se présente à nouveau un choix moral. Il pourrait dire à l'autre : ce que j'ai fait autrefois est terrible, je ne me rendais pas compte ; est-ce que je peux t'aider aujourd'hui ? Mais il se dérobe. Il se défile."
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Messagepar The X Phil » 10 Nov 2005, 12:14

Globalement, par rapport aux différentes réponses :
il faut se rappeller surtout que Haneke est un grand manipulateur, et un sadique de première catégorie. Et que souvent chez lui, ce qu'il a à raconter compte plus que la manière dont il le raconte. Qu'il y ait des troucs narratifs et pas vraiment de fin dans "Caché" compte finalement peu, puisque le film sert de support au réalisateur pour nous parler de plein de choses. Et pour soulever le débat, ce qui marche apparemment !
Après, c'est évident que ça serait encore plus intéressant si on savait vraiment sur quoi on doit débattre (ce qui était le cas dans Funny Games par exemple) !

Néanmoins, Haneke réussit parfaitement son coup lorsqu'il fait sursauter tout le monde avec la terrifiante scène du suicide, ou au début du film lorsqu'il énerve chaque spectateur avec ses plans fixes. Son but est de nous mettre mal à l'aise pour nous interpeller, nous éveiller et nous rendre réceptif aux thèmes de son film. En même temps, une grande partie de sa réflexion à trait à la valeur des images et à la perception de la réalité. C'est pour ça qu'il "s'amuse" avec son film et son spectateur, ça rejoint ce qu'il a à nous dire (quand est-ce qu'un image est "vraie" ? Quelle est la part de réalité dans ce qu'on nous montre ? comment le cinéma retranscrit-il le réel et le fantasme ?...). En tant que cinéaste démiurgique, il y a des tas de moments dans son film (y compris à la fin) où il se met en scène et où son film se regarde lui-même en tant que tel. On n'est plus dans une histoire racontée, mais dans une réflexion sur le cinéma. L'explication comme quoi Haneke serait lui-même le "corbeau" de son propre film me convient du coup très bien.
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Messagepar 101 » 14 Nov 2005, 16:53

Le dernier plan est, je pense, fondamental car en effet (je pensais avoir révé mais non) les deux fils parlent aux bas des marches du lycée. Pourquoi? Comment se connaissent-ils? Le fils d'Auteuil est donc lié à tout ça? je pense. Mais de quelle manière? c'est là le grand flou.... et grande question qui reste sans réponse et qui en mériterait une: les k7 videos. Comment ont-elles été tournées?
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