personaljc a écrit:Depuis ma contrée lointaine dans le nord, je lis vos posts sur Nîmes...
Et bien visiblement, BERCY n'est plus leur maison!!!
Il est loin le temps ou certains se plaignaient des gens qui filment ou prennent des clichés, parce que là, je les remercie vivement, ce concert avait juste l'air ENORME!!!
le cadre est magique et la proximité avec l'audience semble faire la différence, sans compter un Dave au taquet!!!
Je n'ai plus qu'à prier qu'un jour je puisse ENFIN aller les voir la bas et dire bonjour au gars du sud...
En attendant, je les attend de pied ferme (le groupe et les gars du sud!!) à LILLE le 17/11 pour nous faire vibrer de la même manière qu'à NIMES!!!
Le public du Nord se chargera du reste!!!
See you a next time...
J'espère que ma "petite" contribution qui certes va un peu loin dans les détails fera encore travailler votre imagination d'absents, car en effet, ce fut un incroyable concert. Voici donc ma chronique, avec une dédicace spéciale pour Luc Lambert dont la rencontre fut vraiment sympathique.
Récit de ce concert tant attendu et qui fut vraiment à la hauteur de nos espérances. Nous savons tous que dans le rituel du concert modien les petits évènements qui précèdent le grand événement ont leur charme et leur importance. Alors quelques indications personnelles avant d'entamer la revue de ce concert.
Nous faisons étape chez un ami modien en Ardèche. Nous prenons la route le mardi vers midi et certaines circonstances nous obligent à prendre la départementale à partir de Montélimar. Les degrés montent à chaque village franchi, les cigales couvrent le bruit du moteur. On est vraiment dans le sud. Comme conducteur, j'essaye de partir quelques minutes dans les nuages sur le bord de la nationale, histoire de bien me préparer à l'entrée dans la ville mais l'excitation et la chaleur m'empêchent de décrocher. Je ferme donc furtivement les yeux le temps que mon ami traverse la route pour se renseigner sur le prix des brugnons. Nous découvrons les premières formes nîmoises, avec une température extérieure qui franchit les trente cinq degrés. Tous les trois, nous n'avons qu'une obsession en tête : deviner les formes antiques derrière les immeubles.
Après deux approches de garage, nous foulons enfin le sol de la ville méditarréenne. Natacha soulage sa cheville soufrant d'une entorse dans un petit canal destinée à se rafraîchir les pieds. Aussitôt les premiers arcs des arènes se montrent. Une foule assez nombreuse attend à leurs pieds. Mon ami photographie trois modiennes qui comme nous se dirigent vers le lieu sacré. Il fait encore sûrement très chaud mais on oublie cette chaleur-là.
Le privilège de la place numérotée me permet, pour la première fois, d'apprécier le lâché de fans qui attendent leur fosse. Toujours ce réflexe de l'empressement. Cette centaine d'acharnés mettra plus tard le feu aux arènes, aidés de tous les autres et Dave Gahan leur sera, à des très nombreuses fois, très reconnaissant, en les prenant souvent à témoin.
Suite à ce premier flot, nous prenons à notre tour la file. Tout va très vite, dans une organisation qui est naturelle parce que bonne. Toujours ce soulagement de basculer dans l'autre monde. Y être, enfin, ici et maintenant.
L'ascension vers le vomitoire 203 débouche agréablement sur les yeux verrons, avec en fond ciel bleu, d'une charmante hôtesse qui nous indique nos bancs.
Le temps passe alors très vite en découvrant ce décor fantastique. Notre emplacement me semble idéal ; il le sera. Nous parlons peu. Le temps est marqué par les premiers morceaux de DJ set curieusement privés de basses. Je vois les buvettes automatiques installées dans la fosse. Je vois en face le bar qui ne désemplira pas de la soirée. Je me demande à chaque fois comment certains fans peuvent ajouter autant de bière à l'ivresse de la musique.
Arrive ensuite un moment sympathique qui aura aussi son importance au niveau symbolique. Je lie conversation avec une jeune femme dont le compagnon me semble appartenir au forum - les gens se reconnaissent. La femme de Luc Lambert me parle de leurs expériences de concert. A son retour, je discute avec Luc et il me donne l'un des fameux triangles orange pensés par Christian. Il me dit qu'il peut se coller au dos. La figure est un référent pour la reconnaissance des membres du forum. C'est tout simple mais ça me charme. Tout au long de la soirée, le triangle delta connaîtra différents supports, de la poitrine à la chemise, jusqu'à une tentative de collage sur le pare brise arrière de la voiture en rentrant.
L'échange avec Luc est bien sympathique mais je retourne rapidement à ma place. Les arènes se remplissent progressivement, doucement et le son monte insensiblement. Tous les gradins en haut sont rapidement pleins et les auditeurs situés à droite de la scène auront encore longtemps le soleil.
De notre côté le vent préparant aux intempéries de la nuit nous caresse le visage et nous rafraîchit. Le dj set gagne en puissance, en rondeur et en ivresse.
Les derniers rayons de soleil traversent les arcs structurant notre vomitoire. La lumière frise les mollets, trace ses rayons au-dessus des planches ; c'est étonnant et assez magique. Mon ami pris d'un besoin subi de bière nous abandonne un bon quart d'heure, celui précisément où la pression est la plus importante. La fosse est maintenant bien remplie, tout comme les gradins. Tout en haut, des vigiles sont positionnés, on croirait des statues antiques collées à la pierre. Jamais on en devinera en eux un mouvement de danse.
Mon ami revient enfin, une minute peut-être avant les premiers sons de l'intro.
Elle se diffuse avec beaucoup de majesté dans l'enceinte. Les basses sont magnifiques, elles remuent les Cévennes. Les sons de la Guerre des Mondes, mais cette fois pour le bien de l'humanité. Tout le monde vibre. Le groupe fait son entrée et, à la différence des autres tournées, Dave Gahan esquisse des premiers pas de danse. Le chanteur n'est pas du tout dans la tension qui pouvait être ressentie lors de l'intro d'In Chains en 2009. Il est justement libéré de ses chaînes. La voix résonne parfaitement bien. L'homme accomplit les premiers gestes centrifuges de brassage de foule et s'en délecte, tout comme nous. Modestement, j'en fais de même : de ma place, debout, c'est comme si je pouvais toucher d'une main d'ogre les paquets de fans. Une sensation de bonheur mais aussi, n'ayons pas peur des mots, de domination.
Par rapport à la lumière déclinante, l'horaire et la période me semblent idéales. C'est une bonne chose que le concert ne démarre pas tout à fait dans l'obscurité ce soir-là. Souvent, dans les sons amples, ( « larges » comme le dit Dave ) je lève la tête vers le ciel et le son me porte littéralement dans ce mouvement. La lune, située certainement à la plus belle place, nous adresse un salut fraternel. Cette expérience mi tellurique, mi cosmique est permise par les sons de Depeche Mode.
Les titres attendus d'une tournée à l'autre mais qui peuvent paraître fades en boot ont toujours leur effet en concert. C'est le cas de Walking In My Shoes qui est l'exemple même du morceau fédérateur. Sa progression va dans le sens même de la prestation publique : agogies au début, au milieu et à la fin. On comprend que Dave ne se lasse pas de s'étirer avec son pied de micro à la fin. Les mouvements du chanteur sont toujours aussi souples, sensuels, bien que très attendus.
Je crois deviner cependant comme une fatigue ce soir-là. Le groupe vient de faire des concerts filmés en festival et ce n'est pas de tout repos. Martin confie que c'est toujours plus stressant d'être filmé à d'autres fins que les simples projections sur la scène. Cela se ressent ce soir-là avec, parfois, un léger manque de dynamisme dans les mouvements et emportements attendus. Heureusement, la foule, très généreuse, porte vraiment les gars. Je suis donc absolument transporté tout en restant, par moment, confusément déçu. Mais c'est aussi difficile de se maintenir dans l'intensité pendant les deux heures. L'augmentation progressive du volume sonore crée en moi l'incompréhension. Je retrouve la fascination qu'exerçait Should be higher au Grand Journal mais la masse sonore est trop imposante pendant le refrain ; les fameux soufflets dont je parlais dans ma chronique peinent à se faire entendre. Dans le même ordre d'idées, I Feel You est une véritable torture pour les oreilles. Elle ne va pas jusqu'à briser la progression de la liste car heureusement, des morceaux comme enjoy ou Halo nous laissent définitivement au sommet. Mais elle est beaucoup trop saturée, c'est pénible. J'ai cru comprendre qu'elle constituait un besoin vocal pour Dave Gahan.
Passées ces notes négatives, je reviens pour de bon à la positivité qui habite l'ensemble de mon souvenir. Avec notamment ces très beaux films de Corbijn qui ne focalisent pas trop notre attention tout en renforçant le côté majestueux de Heaven. L'écho sur Goodbye fonctionne très bien esthétiquement et renforce l'unité un peu paradoxale d'une set list qui se justifie par les contrastes entre intimité et grande force, gravité et divertissement. Tout me plaît de ce point de vue, de Secret to the end à Just can't get enough. L'apothéose finale, tout le monde la connaît. Depuis le 203 le point de vue synoptique sur les champs de blé est très appréciable, enfin depuis cinq concerts j'arrive à observer cet instant magique dans la globalité. Sur scène, un tigre furieux mais à bout de force donne les dernières impulsions à ce mouvement de communion.
La sortie du désenchantement se fait sans encombre, mais dans la fatigue. Je ramène mes amis endormis sur l'A7 dans une nuit d'éclairs, effet de la secousse modienne. A ce moment précis, je n'ai pas encore récupéré toute l'énergie du souvenir. Depuis, le concert m'accompagne d'une manière nouvelle par rapport aux expériences passées. Les vidéos m'expliquent que Dave n'était pas si fatigué que cela, ou en tout cas, qu'il a su parfaitement géré cet état où on ne le sentait pas toujours complet.
Le lendemain soir, je me retrouve à faire une promenade dans un village charmant au pied du jura et j'entends les accords massifs, extra terrestres de l'intro qui vibreraient dans ce lieu improbable. J'aurai besoin de revivre cela.