par dave1er » 06 Jan 2009, 23:25
Un mort chez les Stooges
Ron Asheton n'est plus. L'homme a été retrouvé mort à son domicile d'Ann Arbor (Michigan). Apparemment inerte depuis plusieurs jours, son corps usé par soixante années d'une vie jamais domptée était étendu sur le canap'. Les causes du décès ne sont pas encore connues, mais la piste d'une mort violente est écartée et l'idée de la crise cardiaque fait son p'tit bonhomme de chemin. Des analyses toxicologiques sont en cours.
À vrai dire, la nouvelle affecte d'autant plus qu'on s'attendait plutôt à l'apprendre une trentaine d'année en arrière, lorsque le musicien semblait déverser dans des riffs en pleine incandescence le moindre quantième des drogues que tous ses partenaires d'anarchie absorbaient alors. Lui-même n'en était pas le plus friand.
"Toute la salle retournait à l'âge de pierre. J'étais terrorisé mais fasciné. Cette musique poussait le public dans ses derniers retranchements. J'ai tout de suite réalisé que c'est ça que je voulais faire, à tout prix", racontait Ron Asheton à propos de ce concert des Who auquel il assista lors d'un périple séminal en Angleterre (1965). Selon la légende, la performance scella le destin du futur guitariste des Stooges.
Guitariste, il le fut sur les deux premiers albums du groupe mythique (The Stooges en 1969 et Fun House un an plus tard), avant d'empoigner la basse pour le terminal Raw Power (1973), après le licenciement sec du bassiste originel Dave Alexander.
Aux côtés d'Iggy Pop et de son frère batteur Scott Asheton, l'homme mutila le paysage musical de l'époque via ses décharges de cordes lugubres et monolithiques, primitives et saturées par la morgue. Fun House, I Wanna Be Your Dog, Down On the Street... lui et Iggy Pop, alors surnaturel de sauvagerie, formaient l'alpha et l'omega d'un rock qui n'aura jamais paru aussi dangereux, dont l'essence première n'aura jamais paru aussi palpable, capable de s'autodétruire tout en engendrant sa descendance (le punk, le metal et tout le tralala).
Après la chute de l'empire, Asheton exerca ses talents simples mais ravageurs au sein de The New Order, Destroy All Monsters ou New Race, et participa aussi à la bande originale du film Velvet Goldmine de Todd Haynes (1998). On passera vite sur le retour calamiteux du trio en 2007 avec The Weirdness, où "Ron Asheton semble tout droit sorti d'une pochette vieillie du You've Come A Long Way, Baby (1998) de Fatboy Slim".
Toujours à propos de ce concert fondateur des Who, Ron Asheton le définissait comme "sa première expérience du chaos". Un chaos dont il demeurera l'un des plus grands ambassadeurs.
"Le rock français, c'est comme le vin anglais." (John Lennon)